Parcours de qualification de 1000 milles : ma première longue navigation en solitaire

11 avril 2024

J’ai décidé de faire mon parcours de qualification (obligatoire, d’une longueur de 1000 milles hors course) entre les deux premières régates de la saison. Le parcours, prédéfini par la classe Mini, s’effectue quand on le souhaite, en fonction de la fenêtre météo. Je suis donc parti de Toscane jusqu’à la Spezia puis le Cap Corse, Minorque (îles Baléares), retour sur le Sud de la Sardaigne avant de longer la côte et d’arriver sur une île de l’archipel Toscan. Mon objectif était de progresser : passer dix jours en solitaire sur le bateau était la meilleure manière de le faire.

Ce parcours a été difficile car j’ai subi des conditions ventées pendant près de deux jours, mais c’est comme ça qu’on apprend ! Lors des premières 36 heures, il faisait beau et chaud. J’ai passé la Spezia le premier soir, avant de mettre le cap sur la Corse. Le lendemain matin, le Mistral s’est levé et j’ai navigué pendant un jour et demi dans 20-30 noeuds de vent avec pas mal de vagues, donc c’était assez chaud. J’ai eu quelques problèmes techniques et je n’ai pas vraiment eu le temps de me reposer. C’était une première expérience musclée pour moi, qui m’a beaucoup appris notamment sur mon bateau, avec plusieurs petites réparations à effectuer.

A l’approche de Minorque, le vent s’est calmé mais j’ai décidé de m’arrêter car la météo annonçait des orages et des conditions brutales sur le parcours retour et à l’approche de la Sardaigne. Après ce que je venais de vivre, j’ai pensé que c’était un choix sage et responsable; le règlement le permet d’ailleurs lorsque les conditions se détériorent de la sorte. J’ai repris la mer dès que la météo l’a permis, mais pendant deux jours il était impossible de sortir du port car les vagues déferlaient. Il restait environ la moitié du parcours à faire. Les conditions ont été assez variées. Au moment de traverser l’archipel toscan, c’était du pur bonheur, j’ai eu des heures de vent portant dans une quinzaine de noeuds, le bateau volait, c’était génial.

Durant cette qualification, je suis passé par tous les états d’esprit. Le quatrième jour, l’électrique a cessé de fonctionner et j’ai été obligé de barrer sans plus pouvoir dormir. J’ai connu des états de fatigue que je n’avais jamais expérimenté auparavant. J’ai eu des hallucinations en luttant pour ne pas dormir. C’était un bon enseignement au niveau de la gestion du sommeil: il faut dormir dès que possible, même si au départ on ne ressent pas de fatigue. Car lorsqu’un problème comme celui-ci survient, dormir n’est plus possible. Il y a également beaucoup à perdre en performance si la fatigue est trop grande.

J’ai fait d’énormes progrès et je suis convaincu que naviguer le plus possible est le meilleur moyen de progresser. C’était intéressant de découvrir comment je gère la fatigue, le froid, l’humidité, notamment mentalement. Je sais que j’ai un peu de travail à faire au niveau de la gestion de soi pour être 100% disponible. Mon bateau est aussi devenu mon compagnon de voyage; ce périple a été important pour que l’on apprenne à se connaître. Chaque pièce de Mingulay est une petite entité dont je dois prendre soin et en échange mon bateau prendra soin de moi.

Ce n’était pas évident mais je suis très heureux d’avoir effectué ce parcours. Et je n’étais pas vraiment en solitaire car le bateau est là, à mes côtés ! C’est mentalement réconfortant.

Vidéo de mon parcours de qualification ici.